AZURO - Matthieu Rozé
“Il n’y a pas de vacances à l’amour”
Un bleu de mer indescriptible, une chaleur étouffante. Azuro a l’odeur de la crème solaire et la langueur des corps gagnés par la torpeur. Pour son premier long métrage, Matthieu Rozé choisit d’adapter Les Petits Chevaux de Tarquinia, un roman de Marguerite Duras. Pas simple de se défaire de cette ombre Duras, empreinte d’une aura dont elle seule avait le secret. Ce phrasé si particulier, ces dialogues lancés comme des couperets, Matthieu Rozé se les accapare et les restitue dans une adaptation libre et réussie.
L’essence de l’été
C’est l’histoire d’un groupe d’ami⋅es qui ne fait rien. « Si vous n’étiez pas là, le monde tournerait pareil » lance une adolescente, frustrée par la langueur généralisée. Mais le groupe lui donne raison et ne s’en formalise pas. Les personnages vivent d’amour et de campari, se plaignent de la chaleur et forment des lignes de corps en symbiose sur la plage. Il demeure une atmosphère de lassitude, marquant une confortable distanciation avec le monde. Peu d’actions prennent place à l’écran : on dort, on boit, on descend à la plage et vice et versa. Les personnages n’ont pas l’air seuls au monde, ils le sont, dans la délimitation que leur donne la mise en scène. Privilégiant les plans en courte focale, dans le format 2:35, Matthieu Rozé donne au paysage l’aspect d’un décor purement cinématographique. Il existe uniquement dans le but d’habiller les protagonistes. Il suit leurs désirs et se pare de rouge quand ceux-ci sont assouvis.
Le récit a des airs de tragédie théâtrale mais Azuro s’y extrait grâce à une chose intangible : le charme. Le film de Matthieu Rozé, terriblement languide, pourrait aisément apporter l’ennui. Et pourtant … Dans l’absence de mouvement de caméra, dans l’érotisme qui s’échappe des regards, dans la simplicité des relations amicales de longues dates résident l’essence de l’été, là où le rien est fantasme et où l’ennui devient une action comme une autre.