Sorociné

View Original

CANDYMAN - Nia DaCosta

Il suffirait de dire cinq fois son nom dans un miroir pour qu’il apparaisse : Candyman, Candyman, Candyman, Candyman… et nous nous arrêterons là car trop frileuses pour oser affronter celui dont la légende s’est construite à travers les récits urbains que l’on se transmet de génération en génération. Candyman fut d’abord un film de 1980 réalisé et écrit par Bernard Rose, lui même inspiré par l'oeuvre de Clive Barker. Déjà assez impressionnant, ce premier long-métrage mettait en scène Helen, (incarnée par Virginia Madsen) chercheuse à l’université dont la thèse portait justement sur cette légende. Empreint des mimiques de sa génération, couleurs vives et récits enivrants, le film se distinguait déjà de ces confrères horrifiques par son approche plus sociale. Dans une cité abandonnée par le gouvernement, les habitants laissés à l’abandon doivent faire face aux dangers qui émanent de l’architecture urbaine : couloirs sombres, appartements vides et crasseux, escaliers désertés. Comme un rappel à notre monde, les humains ne faisaient qu'un avec le paysage urbain et tous étaient plus ou moins associés à celui dont il venait.

Candyman apparait alors comme une ombre, née de la complexité des États-Unis où l'esclavagisme a empoissonné et pourri le drapeau étoilé. C'est dans une parfaite logique, notamment suite au mouvement Black Lives Matter, que la réalisatrice Nia DaCosta fait revivre le mythe. L'esclavagisme d'hier, présent dans le film de 1992, a des répercussions sur le monde d'aujourd'hui, représenté dans la version 2021. Intelligent, le scénario co-signé par la cinéaste (ains que Jordan Peele et Win Rosenfield) aborde des problématiques actuelles, certaines déjà bien présentes dans l'oeuvre originale dont la gentrification, le racisme ordinaire et les violences policières.

En faisant constamment appel au jeu de miroirs dans sa superbe mise en scène, la réalisatrice crée un pont entre le passé et le présent : à la fois au sein du récit puisque Anthony (Yahya Abdul-Mateen II) est obsédé par ce dernier ; et dans la propre histoire du film puisqu'il ne cesse d'interroger le mythe jusqu'à le faire renaitre de ses cendres dans une dernière scène où le tueur d'hier, devient le super-héros d'aujourd'hui.

Candyman est probablement une des plus belles surprise de cette rentrée cinématographique. La réalisatrice Nia DaCosta, révélée avec son touchantLittle Woods en 2017, prouve son talent et son regard unique. Une note d'espoirs puisque cette dernière sera au commande de The Marvels, suite du film Captain Marvel, dont la sortie est prévue en 2022.


Réalisé par Nia DaCosta

Avec Yahya Abdul-Mateen II, Teyonah Parris, Colman Domingo

D’aussi loin qu’ils s’en souviennent, les habitants de Cabrini Green, une des cités les plus insalubres en plein cœur de Chicago, ont toujours été terrorisés par une effroyable histoire de fantôme, passant de bouche à oreille, où il est question d’un tueur tout droit sorti de l’enfer, avec un crochet en guise de main, qui pourrait apparemment être convoqué très facilement par qui l’oserait, rien qu’en répétant son nom 5 fois devant un miroir.

En salles le 29 septembre 2021