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LINA DE LIMA - María Paz González

Réalité musical

Réalisatrice de documentaire, María Paz González propose dans son premier long métrage de fiction un regard sur la migration de femmes péruviennes vers le Chili, pour y trouver du travail.Lina de Lima se base sur la réalité, sur des histoires que la cinéaste a écouté avec attention avant de mêler de la fiction et du musical dans son film. Bien qu’il aborde la solitude et le déchirement, le film se pare d’un aspect coloré et se sert de chansons quand les émotions du personnage principal (impeccable Magaly Solier) sont trop fortes. À l’approche de Noël, Lina sera de plus en plus acculée au Chili, sa terre d'accueil où elle n’a aucun endroit spécifiquement à elle, malgré son envie de rentrer chez elle pour les fêtes.

Divorcée, Lina a dû trouver un moyen pour survivre et subvenir aux besoins de sa famille. Comme de nombreuses personnes avant elle, elle part au Chili pour travailler en tant que gouvernante. Elle s’occupe d’une adolescente, dont les parents (riches) s'absentent souvent et envoie une partie de son salaire à sa mère, qui s’occupe de son fils. Lina ne peut donc pas venir les voir quand elle le voudrait, faute de temps et d’argent. Les vacances de Noël deviennent alors sa seule chance de passer un peu de temps en famille et elle se fait une joie d’y retourner, comme chaque année. 

C’est avec beaucoup de pudeur que María Paz González commence son film et rentre dans l’intimité de son personnage. Lina est en plein emménagement, au téléphone avec son patron pour organiser les vacances. Filmée de loin, et principalement de dos, elle se fond dans le décor comme s’il lui appartenait. Mais il n’en est rien. Bien vite, elle doit quitter cette luxueuse maison pour retourner dans son habitation, une espèce de chambre d’hôte qu’elle partage avec trois autres personnes. Son espace se résume à un lit (superposé), quelques photos accrochées au mur. Hélas, même ce lit n’a rien de reposant, la personne qui dort au-dessus d’elle secoue le lit à intervalle régulier, chaque soir. Nous comprenons son empressement à rentrer chez elle, à combler la distance vers les siens. Mais rien ne se passera comme prévu.

Liens rompus

Le film se concentre sur la technologie et ses limites. Lina a beau être scotchée à son téléphone, à répondre expressément aux vocaux de son fils, et même à accepter ses caprices (acheter un maillot de foot original, donc cher, malgré son budget limité), elle ne peut combler la distance qui les sépare et voit sa famille se détacher d’elle, s’en sortir sans elle. La frustration est d’autant plus grande quand elle s’aperçoit que son ex-mari, lui, réussit  brillamment à refaire sa vie, avec une nouvelle femme, un bébé, sans que personne ne daigne la mettre au courant. C’est par le biais d’Instagram qu’elle scrute le quotidien de son fils et ses fréquentations. Ces photos détournées (car il l’a bloquée) lui donnent un infime accès à son fils du présent et non pas à celui qu’elle a laissé l’année précédente à Noël. Une fois sa journée terminée, c’est par une application de rencontre qu’elle peut obtenir une interaction sociale, des aventures sexuelles brèves, qu’elle organise dans la grande maison vide de son patron, recouverte de housses pour protéger les meubles de la poussière. Ce n’est pas une forme de revanche  — même si le geste est fort dans un Chili barricadé dans sa ségrégation sociale  —  mais plus une forme de confort. Un lit entouré d’une housse en plastique comporte plus d’intimité que son lit superposé et sa chambre bondée. 

Quand la pression est trop forte, l’émotion trop intense, Lina chante et danse. La mise en scène change alors et se pare de surréalisme et de couleurs saturées. Ces séquences “en-chantées” et enchanteuses convoquent un regard fictionnel sur la réalité dépeinte et forment une bulle de positivité empêchant tout misérabilisme. Outre ses malheurs, Lina est un personnage pétillant, présent dans le cadre malgré son travail qui lui demanderait d’être invisible. Lina est un être qui voit et qui comprend en un clin d’oeil les autres, que ce soit l’adolescente dont elle s’occupe ou un immigré noir haïtien, alors que tout deux ne parlent pas la même langue. Il lui est encore plus frustrant d’être incapable de se lier à son propre fils et d’être toujours placée dans la marge, qu’importe ses choix ou son comportement. 

Lina de Lima montre l’invisible et nous invite, par sa dichotomie de ton (réalisme et onirisme chanté), à rencontrer la réalité douce-amère d’un quotidien loin de tout, loin des siens. Lina, héroïne fière et intense (à l’image de son interprète), devient multiple et permet de mettre en lumière ces femmes immigrées par nécessité et non par choix, afin de subvenir, seules, aux besoins de leurs familles


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Réalisé par María Paz González

Avec Magaly Solier, Emilia Ossandon, Exequiel Alvear ...

Comme beaucoup d’émigrés péruviens au Chili, Lina soutient sa famille en travaillant à distance. Lors de son voyage de Noël à Lima pour voir son fils adolescent, elle se rend compte que celui-ci n’a plus besoin d’elle comme auparavant.

Disponible sur MUBI le 23 août 2021