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PEUPLE DE L'EAU - Azadeh Bizargiti

Journée en mer

Le centre audiovisuel Simone de Beauvoir regorge de merveilles, créées par des femmes. Sur leur site, le catalogue est impressionnant et regroupe de nombreux documentaires de par le monde. Au milieu d’entre eux se trouve Peuple de l'eau, Ahle Ab en persan, réalisé en 2019 par la cinéaste iranienne Azadeh Bizargiti. Dans le cadre du mois du documentaire 2021, un cycle « Femmes d’Iran, devant et derrière la caméra » est proposé par Images en Bibliothèque, dont le programme contient le film qui nous intéresse. 

Membre de l’association des réalisateurs de documentaire iraniens, Azadeh Bizargiti filme les femmes. Son cinéma s’emploie à ouvrir une fenêtre sur leur monde. Dans Peuple de l'eau, court métrage de trente minutes, elle suit une pêcheuse, Sakineh Karimbadi, dans une journée type. Film presque sans parole, le documentaire s’apparente à un voyage sensoriel vers un quotidien fait de contraintes et de dangers. 

Quotiden a(mer)

Le bruit des vagues, des pas dans le sable puis dans la mer, le son arrive avant l’image et permet de nous immerger avant même de comprendre l’enjeu du film. Parce qu’il n’y a rien de plus fort qu’un témoignage pour comprendre ce qu’on ne vit pas, d’autant plus quand celui-ci est narré par l’image, la réalisatrice choisit de suivre Sakineh Karimbadi tout au long de son périple. Les images captent la beauté de l’eau, dans l’aube qui se pointe tandis que les pêcheuses sortent leur bateau de la plage pour l’immerger. Parties dans des eaux plus profondes, le cadre magnifie ce voyage et offre une image en contre-jour de ces femmes domptant la mer. Parfois proche pour permettre des gros plans des gestes sûrs de la pêche, la caméra s’éloigne aussi pour isoler les deux femmes dans l’immensité de l’eau, vulnérables, assises dans leur minuscule bateau. En contrepoint de la beauté des images, le son est, quant à lui, dégradé, offrant une dissonance avec ce qui est montré. 

Il leur faut parfois une journée entière pour pêcher une quantité suffisante de poissons afin de négocier un prix confortable. La mer ne leur offre pas seulement des poissons mais aussi des coquillages, avec lesquels elles fabriquent des bijoux, qu’elle vendent sur le marché. C’est un travail de longue haleine, qu’elles effectuent pour subvenir aux besoins de leur famille. Les négociations sont d’autant plus compliquées que ces femmes n’ont aucun statut juridique vis-à-vis de leur profession. Les intertitres, placés en fin de documentaire, sont sans équivoque : ces pêcheuses risquent parfois leur vie en mer (eau capricieuse ou pirates), mais ne sont pas reconnues. Elles n’existent pas. 

Avec Peuple de l'eau, Azadeh Bizargiti leur offre tous les outils du documentaire pour les faire exister dans notre réalité. On comprend alors sa rigueur dans le cadre et sa minutie à enregistrer chaque geste de leur quotidien, afin de revendiquer leur place dans l’île de Hengam.

Cycle « Femmes d’Iran »


Réalisé par Azadeh Bizargiti

Sakineh Karimbadi est l’une des trente femmes de l’île de Hengam, située dans le golfe persique, qui vivent de leur pêche quotidienne. La cinéaste la suit au cours d’une journée au sein de cette micro-société. L’auteur saisit aussi bien la beauté des paysages que celle des traditions humaines. Derrière ce portrait éthéré se cache une situation amère.