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LES ÉTERNELS - Chloé Zhao

Quête existentielle

Fraîchement auréolée de trois Oscars, dont celui du meilleur film et celui de la meilleure réalisation pour Nomadland, Chloé Zhao continue brillamment son chemin, et signe un quatrième long-métrage réussi, pour les studios Marvel. Elle y suit Les Éternels, un groupe d’extra-terrestres millénaires dotés de pouvoirs, venu de la planète Olympia. Envoyé sur Terre il y a plus de 7000 ans - par les Célestes, en particulier Arishem- pour protéger les humains des Déviants, créatures maléfiques, et permettre à l’humanité de grandir et de se développer. À ce prémisse vient pourtant s’inscrire une interdiction de taille : les Éternels n’ont pas le droit d’intervenir dans les conflits touchant les humains, ils doivent seulement éliminer les Déviants qui les menacent.

Zhao touche à des recoins nouveaux de cette machine bien huilée qu’est le MCU (Marvel Cinematic Universe), sans se perdre et parvient même à dire quelque chose dans cette œuvre emplie d’humanité. Elle parvient à mettre sa petite pierre à l’édifice de ce MCU tentaculaire qu’on pensait connaître sous toutes ses coutures pop, grises et mécaniques, en y invitant la philosophie et les conflits moraux. Ces personnages ne sont pas aussi manichéens qu’ils y paraissent et sont tous traversés d’une mélancolie et d’une humanité bouleversante.

Elle célèbre également les cultures orientales et les peuples anciens, peu explorés par le médium du cinéma sauf pour montrer les expéditions colonisatrices de l’Occident. Cette ouverture s’inscrit également dans les espaces choisis par la réalisatrice, qui à part Londres, fuit les villes et la cartographie d’une certaine forme d’urbanisme balisée par les productions Marvel, leur préférant les grandes plaines et les longues étendues désertiques, qui la rappelle à ses premières œuvres.

Zhao aime le travail des espaces et des ambiances du cinéma de Terrence Malick et cela se remarque, à juste titre. Elle délaisse presque l’Amérique, cette terre qui a largement colonisé les imaginaires et les corps super héroïques pour explorer d’autres horizons, procédant à un astucieux récit construit sur une structure simple d’aller-retour. Ce changement d’imaginaire est appuyé par ses choix de casting (excellent) qui n’essaie de faire passer sa diversité pour un effort de progressisme à bon point, mais s’inscrit plutôt en miroir d’une humanité diverse et complexe. On ne pourra quand même pas s’empêcher de noter que c’est le premier film du MCU à inclure un personnage noir homosexuel, Phastos (Brian Tyree Henry) et un personnage sourd, Makkari (Lauren Ridloff). 

Ici pas de dichotomie bien/mal ou héros/méchants mais plutôt la recherche d’une raison d’être et d’exister, comme une forme de paix et un certain équilibre. Les Éternels s’incarnent aussi bien par leurs faiblesses que leurs forces, par leurs certitudes mais surtout leurs doutes. Le film n’échappe pourtant pas à l’écueil de l’humour made in Marvel- encapsulé par le personnage de Kingo (Kumail Nanjiani) - avec son lot de répliques ironiques et de punchlines bien placées mais un peu lourde, rappelant l’influence de Joss Whedon et son sens de la répartie. C’est de bonne guerre, tant le film est un baume salvateur.

Toutes ces pérégrinations spirituelles sont traitées sur un ton adulte, qu’on a peu l’habitude de voir dans ces univers où les héros classiques sont rois, exception faite du sublime Black Panther (2018). Cette mythique famille est animée par un pensée propre à chacun de ses membres et d’une conscience retors mais rafraîchissante. La dissension y a toute sa place et s’incarne par les doutes et les errances successives d’une partie de ses membres, notamment Druig (Barry Keoghan), Thena (Angelina Jolie) et Ajak (Salma Hayek). La famille prévaut également pour ses êtres venus d’ailleurs, dessinant une unité familiale qui s’accompagne jusqu’à l’aube du monde et des galaxies lointaines, prenant en considération les choix et les croyances de chacun‧e, qu’elle soit en accord ou désaccord. Chaque être à voix au chapitre dans cette épopée contemplative et éthérée d’une justesse bouleversante.


Réalisé par Chloé Zhao

Avec Gemma Chan, Salma Hayek, Angelina Jolie ...

Depuis l’aube de l’humanité, les Éternels, un groupe de héros venus des confins de l’univers, protègent la Terre. Lorsque les Déviants, des créatures monstrueuses que l’on croyait disparues depuis longtemps, réapparaissent mystérieusement, les Éternels sont à nouveau obligés de se réunir pour défendre l’humanité…

En salle le 3 novembre 2021

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