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MÉDUSE - Sophie Levy

Des vies volées en huis clos

Passé par pléthore de festivals et presque autant de prix avant sa sortie en salles, Méduse est le premier long-métrage de la réalisatrice française Sophie Levy, initiée précédemment aux court-métrages et aux clips musicaux. Avec une forte dimension esthétisante, qui s’inspire autant de la mythologie grecque que de ses représentations picturales de la Renaissance, Méduse nous raconte l’histoire de deux sœurs reliées par un lien aussi fort que douloureux.

La première, l’hypnotisante Romane, interprétée par Roxane Mesquida, travaille de jour et prend soin le reste du temps de sa petite sœur Clémence (Anamaria Vartolomei, consacrée dans L’Événement), rendue mutique et invalide par un accident qui a coûté la vie à leur mère. Toutes deux vivent dans la luxueuse maison familiale, cadre d’un huis-clos où les tensions de cette relation invalide-aidante vont éclore à l’arrivée de Guillaume (Arnaud Valois), petit ami de Romane. Celui-ci va se prendre d’affection pour Clémence, et se donner pour mission de lui redonner parole et vie.

C’est sans doute dans cette exploration des tensions et des culpabilités muettes que Sophie Levy réussit le mieux son récit. Les colères de Romane, son sentiment d’urgence à l’idée de passer à côté de sa vie, s’entrechoquent avec la culpabilité d’avoir survécu indemne à l’accident fatidique. De l’autre côté, Clémence lutte silencieusement entre sa peur de devoir un jour se passer de sa sœur, et sa colère d’être mise à l’écart dans son existence. Toutes les deux, en somme, tentent de réfréner le sentiment d’une vie volée, que la présence de Guillaume va exacerber en mettant en place ce qui semble être un triangle amoureux.

C’est bien ici que Méduse pêche un peu et souffre de la dimension mythologique et esthétisante qui semble plaquée sur son récit. Certes, la suspension de crédulité est inhérente au mythe, mais l’intrigue liée à la présence de Guillaume semble trop en surface pour être prise au sérieux. En quoi serait-ce l’arrivée d’un homme qui libérerait Romane de son lien contraignant envers sa sœur ? Comment croire au fait que la beauté seule de Guillaume permette à Clémence de retrouver rapidement la parole, là où une équipe de médecins a probablement échoué ? Avec un prince qui réveille par sa tendresse la belle endormie, on pense davantage à la Belle au bois dormant qu’au mythe de Méduse, dont les nombreuses références picturales ponctuent pourtant l’œuvre. C’est dommage, car le projet s’annonçait prometteur au vu des nombreuses relectures contemporaines du mythe de la Gorgone ; mais il propose un récit qui manque d’audace malgré des qualités de réalisation et d’écriture.