Sorociné

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Festival Chéries-Chéris : LEVANTE - Lillah Halla

© Rezo Films

Bend it like bell hooks 

Le premier film de Lillah Halla conjugue sororité, amour du sport et plaidoyer pro-choix.

Sofia, 17 ans, est de celles qu’Emerald Fennell qualifierait de « jeune fille prometteuse ». L’adolescente brésilienne est un prodige du volley-ball dans une équipe inclusive et les choses pourraient bien passer au stade supérieur avec le championnat qui approche. Problème : elle tombe enceinte, dans une commune conservatrice où les cliques de pro-vie paradent sans honte.

Que vivent la lutte et les amours éternels

La situation est glaçante et tristement banale au Brésil, qui s’est retiré en début d’année de l’accord international du consensus de Genève garantissant le droit à l’avortement. Les conservateurs opposés à ce que les jeunes filles et les femmes disposent de leurs corps comme elles l’entendent sont offensifs, sévissent dans de fausses cliniques et jettent l’opprobre sur celles qui les défient. Dans le thriller insurgé de Lillah Halla, rien n’est passé sous silence. Il s’agit de révéler toute la laideur « pro-vie », ou plutôt « pro-mort des femmes » comme elle le suggère.

La nouveauté sera de ne pas dépeindre une adolescente isolée et sans défense, mais une jeune femme déterminée, insérée dans un réseau de solidarités queer qui constitue son seul refuge. Si Levante montre qu’il faut changer la loi et faire battre en retraite l’extrême-droite, il met aussi en exergue l’amour comme arme politique contre la haine. Au milieu de toute l’intensité du film sont aménagées des pauses intimistes et douces, apaisant l’héroïne comme le public tenu en haleine. Car la puissance de Sofia, c’est sans doute son mental d’acier et la radicalité qu’elle renouvelle sans cesse aux côtés de ses adelphes, partenaires de crime tant que l’autonomie des femmes en sera un. Haut les cœurs, semble crier ce gang de marginales enfiévrées, qui déploient leurs muscles à la guerre comme à la danse et dans cet effort sportif et inclusif qui les maintient vivantes.

LEON CATTAN