Sorociné

View Original

Festival Chéries-Chéris : BLUE SUMMER - Zihan Geng

© The Seventh Art Pictures

L’été où je suis devenue lesbienne

Présenté à la Quinzaine des cinéastes 2023, Blue Summer brode tout en douceur et en nuances de bleu une romance adolescente à sens unique. 

“Straight girls. They’ll fuck you up every time.” (« Les hétéros. Elles te bousilleront à chaque fois. », ndlr.) Il y a eu tellement de pépites dans Orange is the New Black qu’on en oublierait presque celle-là, délivrée par Nicky Nichols, la papesse des lesbiennes déglinguées. Pourtant, c’est vrai qu’on connaît la rengaine : une fille réalise qu’elle est attirée par les femmes en tombant amoureuse d’une amie proche qui est évidemment hétérosexuelle et chaotique dans son mode de vie. L’expérience, constitutive dans la vie de beaucoup de femmes queer, est retraduite dans une liste interminable de films, de séries et de livres. Pour autant, doit-elle cesser d’être racontée ? Blue Summer de Zihan Geng donne envie de penser le contraire.

Le début du film prend le chemin des coming of age adolescents – parce que sa mère part pour l’été, Xian, 15 ans, va vivre chez son père, un adulescent qui possède un studio photo. C’est là qu’elle fait la connaissance de Mingmei, son aînée au charme magnétique. À mesure que Xian sort de sa zone de confort, elle s’enfonce un peu plus dans un cocon bleuté, où il fait bon vivre pour le spectateur. Filtre bleu à la Catherine Hardwicke et esthétique aussi désuète que le studio du père de l’héroïne, Blue Summer dégage une nostalgie réconfortante. Son histoire d’amour à sens unique rappelle ces shōjos des années 1970 où le lesbianisme devait être dépeint entre les lignes avant de retourner vers l’hétérosexualité. « Le genre des personnages importe peu », confie Zihan Geng à Sorociné. « Blue Summer est avant tout un récit d’apprentissage. » C’est peut-être ça qui manque à cette fin douce-amère : une prise de position plus affirmée.


LEON CATTAN