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SEX EDUCATION, SAISON 4 - Laurie Nunn

Copyright SAMUEL TAYLOR/NETFLIX

Éducations sentimentales

La série culte pour ados revient dans une saison finale mettant à l’honneur la transidentité et l’inclusivité, mais souffre d’une écriture paresseuse et de rebondissements réchauffés.

Dans le royaume du lycée, l’éducation sexuelle est reine. C’est sur ce mantra que s’est développée depuis 2019 la série Sex Education, estampillée Netflix – une des plus populaires de la plateforme. À l’origine, le concept est franchement novateur et rafraîchissant : Otis, un adolescent, fils d’une sexologue et moyennement à l’aise dans sa peau, met en place au lycée un cabinet clandestin de sexologie, à l’initiative de sa camarade (et peut-être plus si affinités) la rebelle Maeve. Sur cette trame défilent habilement une série de représentations des sexualités diverses, leurs questionnements et leurs doutes sans tabous, le tout sur une tonalité joyeuse qui ne fait jamais défaut.

Quatre saisons plus tard, les personnages ont grandi, et la trame qui faisait la qualité des deux premières saisons s’essouffle à vouloir se recycler. Exit le lycée de Moordale, fermé en fin de saison précédente ; pour cette dernière rentrée, les adolescent.es se retrouvent au Cavendish College, un lycée ultra-progressiste, écolo et LGBT-friendly, où les good vibes font loi – ce qui n’empêchera pas une concurrence acharnée entre apprentis sexologues, des questionnements entre identité sexuelle et foi religieuse, ou le retour tant redouté de Maeve, partie terminer sa scolarité aux États-Unis.

Il était risqué d’entamer une ultime saison dans un nouvel environnement, avec sa flopée de nouveaux personnages là où l’on attendrait davantage que des arcs narratifs soient conclus. C’est bien le principal problème, car si la nouveauté du Cavendish College permet d’exposer une myriade de personnages LGBT, elle ne dépasse jamais la simple représentation et finit par faire de toute cette petite bande un catalogue de personnages-tiroirs. Certes, avec une nouvelle galerie de personnages transgenres, non-binaires ou non-valides, Sex Education fait de l’inclusivité et la transidentité le thème central de cette dernière saison ; mais elle n’en développe jamais les personnages, les rendant au mieux anecdotiques, au pire irritants.

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Avec un cahier des charges aussi rempli (on y évoque la transition de genre et ses coûts médicaux, les défaillances envers les personnes à mobilité réduite, l’asexualité, mais aussi la dépression post-partum, les nudes ou le polyamour), la série se perd dans ses ramifications et néglige ses personnages principaux, jusqu’à bâcler leurs intrigues – ou en rajouter artificiellement d’autres. En témoigne le personnage de Jackson Marchetti, ancien sportif anxieux élevé par deux mères, qui suit dans cette saison un scénario cousu de fil blanc pour en arriver à se questionner sur son géniteur, et finir sur une révélation noyée dans l’œuf. C’est particulièrement dommage, car les scénaristes offraient avec Jackson une représentation positive et néanmoins complexe de l’homoparentalité, mise à mal par une pirouette finale inutile. 

Du côté de Maeve, son parcours aux États-Unis effleure des questionnements sur les rapports de domination entre professeurs et élèves, la désillusion ou le poids de l’origine sociale en milieu scolaire, qui se résolvent avec une facilité déconcertante. C’est finalement lorsque son personnage revient à ses sources qu’il est le plus touchant : quand arrive l’indicible, Maeve laisse enfin éclater sa vulnérabilité et défait son aura figée d’héroïne badass, brillante et invincible malgré son fardeau familial, qui devenait lourde à porter.

Avec cette saison finale en demi-teinte, Sex Education souffre de son écriture redondante : chaque problème sexuel trouve rapidement sa solution psychologique, chaque comportement découle d’un trauma précis. Comme une recette suivie à la lettre, la pédagogie sexuelle qui faisait la qualité de la série se fait automatique et perd en crédibilité. Il en va de même pour le duo Otis-Maeve, dont la tension amoureuse s’essoufflait déjà dans la saison précédente : à force de ponctuer leur relation d’obstacles, le moteur peine à redémarrer, et la conclusion de leur histoire a un goût artificiel. Difficile en série de ne pas rallonger la sauce ad æternam : pour Sex Education, sans doute aurait-il mieux valu s’en tenir aux deux premières saisons, un sans-faute à tous points de vue.

MARIANA AGIER