UN MONDE - Festival de Cannes

Cette 74ème édition du Festival de Cannes est riche en premiers longs métrages de réalisatrices etUn monde de Laura Wandel fait partie d'un palmarès bluffant. À 36 ans la cinéaste signe une oeuvre maîtrisée et d'une justesse implacable sur le harcèlement scolaire et le rejet. Présenté à la sélection Un Certain Regard, Un monde fait sensation et il le mérite amplement.

Micro-société, gros problèmes

La rentrée est toujours un moment aussi excitant qu'effrayant et c'est ce que la jeune Nora, qui entre en primaire, est sur le point de vivre. Peu rassurée elle commence par prendre dans les bras son frère, Abel qui lui est déjà "un grand" qui la rassure en la conviant à un rendez-vous à la récrée. Le monde de cette petite école française parait immense à la hauteur d'épaules d'enfants de primaires. Un choix de cadrage justifié et assumé qui ne bougera que très peu et qui obligera les adultes à se baisser pour s'adresser aux jeunes personnes. Un petit monde physique qui révèle des problèmes immenses. Nora, qui cherche à rejoindre son frère à la récréation découvre qu'il fait, malgré lui, partie d'un groupe d'oppresseurs qui se jète sur un enfant sans défense. Le gang de requin découvre Nora et pour que celle-ci soit en sécurité, dans un élan de fraternité, Abel se met en travers. Un geste affectueux qui le fera basculer dans le camp adverse : celui des victimes.

Comme en dehors de l'école, être une victime n'est pas le meilleur des rôles pour s'insérer en société. Oppressée mais culpabilisée, les victimes sont jetées en pâture et leurs entourages parfois incapables d'agir. C'est d'ailleurs là qu'est tout le sujet du film. Nora se sent coupable, elle qui déjà se sent seule dans cette école où les fractures sociales sont déjà bien identifiées : vêtements déjà trop usés, père sans travail et bientôt un frère harcelé. C'est toute la société qui se concentre dans un environnement aussi petit et pourtant déjà si marqué par les inégalités.

Dans la veine d'un Jusqu'à la garde, la cinéaste décortique les oppressions systémiques où, on le sait, le microcosme scolaire en est un des principaux lieux. Mais malgré la cruauté majoritairement mentale qui se dresse devant nous, la caméra intime et proche de ses sujets cueille une empathie sincère.

Laura Wandel offre un premier long-métrage solide en abordant un sujet tabou. Avec une mise en scène brute et maîtrisée, elle dirige un duo d'enfants-acteurs remarquable. Un drame social renversant et bouleversant à ne pas manquer.


Réalisé par Laura Wandel

Nora entre en primaire lorsqu’elle est confrontée au harcèlement dont son grand frère Abel est victime. Tiraillée entre son père qui l’incite à réagir, son besoin de s’intégrer et son frère qui lui demande de garder le silence, Nora se trouve prise dans un terrible conflit de loyauté. Une plongée immersive, à hauteur d’enfant, dans le monde de l’école.

En salles le 10 novembre 2021

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