Notre top spécial films lesbiens

Tous les mois, la rédaction de Sorociné vous partage ses coups de cœur thématiques. En novembre, pour faire écho au festival Cineffable qui célébrait début novembre le cinéma lesbien, Enora Abry, Noémie Attia, Lisa Durand, Mariana Agier, Léa Larosa et Victoria Faby vous dévoilent leur sélection de films lesbiens.


Carol, Todd Haynes, 2016

Disponible en location sur CanalVOD et Universciné

Pour Todd Haynes, Cate Blanchett s’affranchit du genre et du temps. Après avoir incarné Bob Dylan dans un biopic-essai délirant (I’m Not There, 2006), l’actrice se glisse dans la peau d’une bourgeoise des années 1950, déstabilisée par son amour pour une jeune vendeuse (Rooney Mara, qui a décroché le prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes pour ce rôle). Évitant l’écueil de la romance sulfureuse et sensationnaliste, le réalisateur braque sa caméra sur l’entourage du couple afin de peindre la société américaine d’après-guerre, profondément sexiste et homophobe. Si le développement et les analyses paraissent aussi justes, c’est aussi parce que le film a été adapté du roman éponyme de Patricia Highsmith, publié en 1952. Un roman qui, à l’image de la relation prohibée des deux protagonistes, a subi la censure avant de reparaître au grand jour dans les années 1980. E.A.


But I’m Cheerleader, Jamie Babbit, 1999

Disponible sur Amazon Prime

Dans But I’m a Cheerleader, Natasha Lyonne campe le rôle de Megan, une pom-pom girl parfaite et populaire qui découvre son lesbianisme lors de sa thérapie de conversion au sein de l’organisme True Directions. Dans cet établissement, on tente de rendre hétéros des ados gays en les faisant vivre en non-mixité imposée : les filles entre filles et les garçons entre garçons. Heureusement, l’ordre patriarcal est sain et sauf grâce au talentueux professeur de masculinité incarné par nul autre que… RuPaul. Malgré tous les efforts des thérapeutes, l’inévitable arrive et Megan tombe amoureuse d’une de ses camarades incarnée par une Clea DuVall en ado torturée, le pendant lesbien du trope du beau gosse ténébreux. Le raisonnement par l’absurde de But I’m a Cheerleader en fait une comédie romantique comme on les aime : drôle, subversive, et résolument camp. N.A.



My Summer of Love, Paweł Pawlikowski, 2004

Disponible sur UniversCiné

Sous la chaleur de la campagne anglaise, la prolétaire Mona (Natalie Press) rencontre la bourgeoise Tamsin. C'est l'été de toutes les découvertes, les mensonges et les désirs. Les deux jeunes adolescentes nouent une amitié fusionnelle se muant progressivement en passion dévorante, devant la caméra naturaliste et sensible de Paweł Pawlikowski (Ida, Cold War). Entre luttes de classes, amour violent et mysticisme religieux , My Summer of Love est un film à la langueur brûlante, qui révèlait la comédienne Emily Blunt, dans le rôle de l'incandescente et ambiguë Tamsin. L.D.


Love Lies Bleeding, Rose Glass, 2024

Disponible sur UniversCiné

Présenté comme un “thriller lesbien sous stéroïdes”, Love Lies Bleeding est le deuxième film de la réalisatrice britannique Rose Glass après l’horrifique Saint-Maud qui avait fait une sortie (trop) discrète en 2020. Campé dans les années 1980 reaganiennes, où le culturisme connaissait ses heures de gloire, le film suit l’histoire d’amour entre la bodybuildeuse Jackie (Katie O’Brian) et la solitaire Lou (Kristen Stewart), qui se retrouveront enrôlées malgré elles dans les sombres affaires familiales de Lou. Dans Love Lies Bleeding, la violence se retourne contre ses agresseurs, de la même manière que Rose Glass retourne le registre cinématographique masculiniste pour en faire un ode aux amours lesbiennes. Et questionne, tout au long de son film, cette réappropriation de la violence de ses agresseurs. M.A.


The Watermelon Woman, Cheryl Dunye, 1996

Disponible sur Criterion Channel

L'originalité de The watermelon woman contribue sûrement à sa renommée dans le patrimoine du cinéma lesbien. À la frontière entre documentaire et fiction, Cheryl Dunye incarne avec beaucoup d’humour une version alternative d’elle-même, naviguant dans les rues mouvementées de Philadelphie entre ses amitiés et sa relation amoureuse plutôt foireuse. Son obsession : la quête d’une actrice noire aperçue dans un film mais non créditée au générique, comme beaucoup d’autres dans le cinéma Hollywoodien des années 30. Une façon habile d’amener avec légèreté une charge politique immense. Si le jeu n’est pas parfait, l’énergie brute qui se dégage du montage et l’impertinence de Cheryl Dunye forment un résultat savoureux. L.L.


Audience, Barbara Hammer, 1982

Disponible sur YouTube

Comment parler des cinémas lesbiens sans citer celui de Barbara Hammer, cette réalisatrice féministe et lesbienne à la filmographie expérimentale aussi prodigieuse que déroutante ? Si tous ses films sont à découvrir, Audience en est une belle porte d’entrée car on suit la réalisatrice en personne questionner par centaines les spectatrices de ses films à San Francisco, Londres et Toronto. Entre deux traits d’humour, le film dessine alors avec sensibilité l’importance de regarder du cinéma lesbien et d’en créer. Plus encore, il laisse s'exprimer la revendication des lesbiennes à être émancipées des imaginaires hétéronormés. En bref, il y aurait mille choses à valoriser de ce film mais peut-être peut-on simplement réaliser à quel point il est rare qu’un ou une cinéaste rende ainsi horizontale sa relation avec le public. Il s’agit là d’un geste puissant, précieux, finalement à l’image du cinéma politique et sincèrement révolutionnaire de cette réalisatrice exceptionnelle. V.F.

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