Cinq ans après avoir accusé Gérard Depardieu, l’actrice Emmanuelle Debever s’est suicidée

Emmanuelle Debever dans Un jeu brutal

Tristement connue pour avoir accusé Gérard Depardieu d’agression sexuelle en 2019, l’actrice Emmanuelle Debever s’est suicidée le 7 décembre 2023 à Paris.

Triste nouvelle pour la grande famille du cinéma français, qui a perdu une de ses filles. D’après la journaliste de Libération Camille Nevers, la comédienne Emmanuelle Debever s’est donnée la mort le 7 décembre 2023 en se jetant dans la Seine, à Paris, à l’âge de 60 ans. Après avoir mis un terme à sa carrière en 1989 pour des raisons inconnues, elle revient sur le devant de la scène en 2019, quand elle accuse Gérard Depardieu de l’avoir agressée sexuellement sur le tournage de Danton d’Andrezj Wajda. Un événement qui n’effacera pas sa carrière, remplie de rôles combatifs et indociles.

Une actrice à la force tranquille

« Je regarde la place, les gens. Je me demande où il faudrait mettre une bombe pour en tuer le plus possible », déclare Emmanuelle Debever dans Un jeu brutal. Si la marseillaise d’origine a commencé le cinéma en 1982 avec Douce enquête sur la violence de Gérard Guérin, c’est dans le rôle principal du film de Jean-Claude Brisseau qu’elle a laissé une forte impression. Elle y jouait Isabelle, enfant d’un tueur en série aux jambes inertes, serrées par des prothèses en métal. Âpre et misanthrope, l’adolescente découvre les plaisirs de la chair en même temps que les abysses de la cruauté humaine, se révoltant contre son bourreau paternel jusqu’à l’arrestation de ce dernier.

Dans Danton, film d’Andrezj Wajda de plus de deux heures, pas une réplique ne s’échappe de la bouche de Louison, épouse du révolutionnaire campé par Gérard Depardieu. Pour autant, Emmanuelle Debever a instillé dans le personnage une hostilité silencieuse, à l’image de celle qu’elle ressentait pendant le tournage à l’égard de son partenaire. C’est en 2019, sur sa page Facebook, que sont venues les premières déclarations à propos des faits, intervenus en 1982. Réagissant au classement sans suite de la plainte pour viol et agressions sexuelles de Charlotte Arnould, elle écrivait : « No comment. Le monstre sacré s’était permis bien des choses durant ce tournage… profitant de l’intimité à l’intérieur d’un carrosse. Glissant sa grosse patte sous mes jupons, pour soi-disant mieux me sentir… Moi, ne me laissant pas faire. » Discrètement, sa voix s’est jointe à celle des 18 femmes qui se sont exprimées contre l’acteur. 

« Jamais, pour aucuns rôles proposés, je n’aurais franchi certaines barrières »

Une position d’insoumise qu’elle avait revendiqué de nouveau à la mort du réalisateur Jean-Claude Brisseau, condamné pour harcèlement sexuel : « Une comédienne doit savoir dire non et s’imposer des limites. Jamais, pour aucuns rôles proposés, je n’aurais franchi certaines barrières. » À ce stade, la carrière de la Montrougienne était finie depuis bien longtemps. Avant sa mort, elle travaillait dans un monastère et partageait son amour pour Boris Vian et son chat gris, Eustache, sur les réseaux sociaux.

C’est par ce biais que ses amis lui ont rendu un dernier hommage, à l’instar de Bertrand Ledrappier, commercial dans le secteur bancaire : « Nos vies respectives, son mari Henri qu’elle chérissait, la brasserie de Montparnasse Le Select dont elle était une habituée… Tous ces échanges sont désormais de beaux et déchirants souvenirs. »

Si son suicide est intervenu le jour de la date de diffusion du Complément d’enquête sur France 2 consacré à Gérard Depardieu, aucun lien de causalité n’a été officiellement établi. 

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