FALCON LAKE - Charlotte Le Bon

Falcon Lake

A Ghost Story

Au bord d’un lac se tient debout Bastien (incarné par Joseph Engel), un jeune adolescent vêtu d’un drap blanc. Sa silhouette fantomatique se dessine et se fond avec le paysage : l’eau et les herbes chaudement brûlées par les UV d’un soleil de plomb. C’est une image qui reste, qui hante et qui illustre tout autant la sensibilité que l’intelligence du regard de la désormais réalisatrice Charlotte Le Bon. Cette image, une photo que prend Chloé (interprétée par Sarah Montpetit) est tragiquement annonciatrice. Elle encapsule le futur du personnage dans un moment présent qui, lui-même, devient passé lorsqu’il est capturé par l’appareil photo de l’adolescente. Le temps et l’errance des corps dans ce dernier est le fondement de ce premier geste de cinéma. Dépassant totalement la simple romance adolescente saisonnière pour en faire un récit spirituel à la frontière du conte.

Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs pour sa 54ème édition qui se déroule du 18 au 27 mai, Falcon Lake marque les débuts de l’actrice Charlotte Le Bon derrière la caméra. Sensible, doux et touchant, ce premier long-métrage dresse le portrait d’un jeune adolescent, Bastien, en vacances en famille au bord d’un lac au Québec. Pendant la douceur des jours d’un été qui semble s’éterniser, Bastien tombe amoureux de Chloé, une adolescente plus âgée. En distillant au fur et à mesure des détails, parfois capturés de très près par la caméra, le récit se déploie avec force. Les silhouettes se dessinent dans l’encadrement d’une porte, d’une fenêtre qui laissent apparaître les courbes d’un corps dans une chambre plongée dans la pénombre ou encore lorsqu’un visage est couvert par une cagoule blanche. Même si il est fort en symboliques, autant photographiques que scénaristiques, il évite soigneusement les lourdeurs grâce au regard amoureux de la cinéaste. Elle aime ses personnages et nous emporte avec elle dans cette fascination.

L’élégance de la mise en scène épouse le récit d’un amour naissant, aux allures gothiques, qui détient la capacité d’arrêter le temps et de nous emporter jusqu’à la scène finale dans une profonde mélancolie. À la manière d’un David Lowery et de son A Ghost Story - en moins radical - , la caméra erre comme ses personnages dans cette carte postale estivale. Introduisant d’abord Chloé, adolescente aux humeurs morbides comme une figure fantomatique puis Bastien, destiné à une errance éternelle comme le fruit d’un amour d’été qui porte en lui les promesses d’une vie. Les désirs, les rêves et les espoirs forment une pulsion de vie qui détient en elle une pulsion de mort en témoigne une dernière partie particulièrement bouleversante. On quitte alors le film comme on quitte l’été : reconnaissant d’une rencontre qui nous marque à jamais, mélancolique de souvenirs désormais gravés et triste car on sait qu’il ne reviendra jamais ou en tout cas pas tout à fait.

Retrouvez notre couverture complète de la 75ème édition du Festival de Cannes

Réalisé par Charlotte Le Bon

Avec Joseph Engel, Sarah Montpetit, Monia Chokri


Une histoire d'amour et de fantômes.

En salle le 7 décembre 2022

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