COMME À LA MAISON - Mai 2022

Fini les sempiternels « Qu’est ce qu’on regarde ce soir ? » et les longues errances sur Netflix ! Chaque mois, on vous propose quelques recommandations de films disponibles en VOD ou SVOD à travers une thématique féministe, et/ou avec une femme derrière la caméra. Une chose est sûre, il y en aura pour tous les goûts.

Au programme ce mois-ci : la terrible arrivée de la puberté, une poupée vaudoue, de l’amitié et du roller !


LA RECOMMANDATION DE … LEON

Alerte rouge – Domee Shi (2022) - disponible sur Disney +

Synopsis : Meilin Lee, 13 ans, est une pré-ado irréprochable. Excellente à l’école et toujours pleine d’énergie, elle se démène pour être à la hauteur des attentes de sa mère. Mais après un évènement particulièrement embarrassant, Meilin se découvre un bien étrange pouvoir : celui de se transformer en panda roux quand elle est dépassée par ses émotions.

Après le court-métrage Bao, qui a fait d’elle la première réalisatrice de courts chez Pixar, Domee Shi s’essaie à l’exercice du long avec brio. Alerte rouge cerne les affres de la puberté dans la joie et la bonne humeur, ce qui ne l’empêche pas d’évoluer vers des thèmes plus sérieux comme la pression familiale et la représentation des communautés Chinoises à l’écran. Attachantes et proactives en toutes situations, ses personnages féminins portent un beau message sur la solidarité féminine et la stigmatisation de leurs émotions, qui ne sont plus quelque chose à éradiquer mais à apprivoiser.


LA RECOMMANDATION DE … AMANDINE

Indecent Desires de Doris Wishman (1968) - disponible sur MUBI

Synopsis : Un solitaire découvre une connexion surnaturelle entre une poupée et une jolie blonde. Il met dès lors cette découverte au profit de ses intentions peu scrupuleuses…

Dans Bad Girls Go To Hell, Doris Wishman explorait déjà le roughie surréaliste, et lui apposait une lecture ambigüe sur la violence patriarcale. Indecent Desires clôt une sorte de diptyque dans lequel un pervers assouvit ses fantasmes à travers une poupée vaudoue. Dans un genre éminemment masculin, et particulièrement à destination de l’oeil masculin, Doris Wishman dessine un male gaze malade, dans lequel on peut y lire la naissance d’un regard féminin, qui éclot dans les coupes abruptes, focalisée sur le désir (consenti) et sur l'environnement de son héroïne


LA RECOMMANDATION DE… MANON

Ego - Hanna Bergholm, disponible en VOD depuis le 26 avril 2022

Synopsis : Tinja a 12 ans. Sa mère la pousse à faire de la gymnastique, exerçant sur elle un perfectionnisme malsain. Une nuit, la petite fille va faire la découverte d’un œuf bien étrange, qu’elle va cacher, puis couver. Jusqu’à l’éclosion d’une inquiétante créature…

Bien que primé à Gerardmer, Ego n’a pas bénéficié d’une sortie dans les salles françaises et c’est bien dommage ! Il y a, sous le contraste entre un monde parfait léché jusqu’au ridicule, et l’œuf horrifique, un thème fort et encore relativement peu abordé au cinéma : la relation mère/fille, notamment lors de la puberté. L’esthétique du film est le reflet du parcours d’une adolescente, partagée entre son envie de faire plaisir à sa mère et un désir naissant de rébellion. Tinja découvre, pour la première fois de sa vie, les complexes d’une métamorphose, rejetée par son adulte référente. Cette dernière est poursuivie par des idéaux irréalisables, maudite par l’impossible perfection qu’elle tente d’imposer à son aînée, à défaut d’avoir réussi à l’atteindre elle-même. La principale qualité d’Ego est probablement sa sensibilité quant à son approche si juste de cette période difficile, laissant la sensation d’avoir brisé un tabou intergénérationnel qui encombre encore les jeunes filles. En mêlant l’Instagramable et la libération féminine, le film parvient s’inscrire dans notre époque.


LA RECOMMANDATION DE… LAURA

Senses - Ryūsuke Hamaguchi (2015), disponible sur Arte.tv

Synopsis : A Kobe, au Japon, quatre femmes partagent une amitié sans faille. Du moins le croient-elles : quand l’une d’elles disparaît du jour au lendemain, l’équilibre du groupe vacille. Chacune ouvre alors les yeux sur sa propre vie et comprend qu’il est temps d'écouter ses émotions et celles des autres…

Avant le succès de Drive my car, Ryusuke Hamaguchi avait réalisé Senses qui, comme son nom l’indique, est rythmé par les cinq sens humains. Caractérisé par la critique comme une œuvre sérielle — le récit est découpé en trois parties — Senses est pourtant un film à part entière, une œuvre-fleuve où le réalisateur analyse les relations amoureuses et amicales. On y suit quatre amies à l’aube de leur quarantaine. Elles sont mariées, divorcées, mères ou célibataires. Mais quand l’une disparaît, sans un mot, c’est la vie des trois autres qui en est bouleversée. Elles remettent en question leur choix de vie, leurs idéaux, leur mariage et leurs relations. Hamaguchi étire le récit pour mieux contempler ses personnages afin de tendre un miroir à des problématiques actuelles, propres à la société japonaise, qui peuvent aussi se refléter dans notre monde occidentale. Senses redessine les contours des normes que les protagonistes représentent pour mieux déconstruire les codes sociétaux. Présenté au festival Locarno en 2015 comme un seul film de cinq heures (appelé à l’époque Happy Hour), ce nouveau format segmenté permet de choisir la façon dont nous voulons approcher l’histoire. D’une traite ou avec des pauses, le film se regarde comme on lirait un livre : en se déversant soi-même au sein de l'œuvre pour mieux comprendre les enjeux. 


LA RECOMMANDATION DE… LISA

Into The Blue - Antoneta Alamat Kusijanović (2017), en accès libre sur Vimeo

Synopsis : Julija, 13 ans, et sa mère fuient leur foyer violent pour trouver refuge sur une île croate idyllique où Julija a grandi. Marquée émotionnellement, Julija cherche désespérément à renouer avec sa meilleure amie, Ana. Mais Ana est amoureuse d'un garçon et Julija n'est plus une priorité. Le rejet croissant d'Ana ravive les blessures et l'histoire familiale de Julija, réveillant le monstre de violence qu'elle pensait avoir laissé derrière elle.

Avant de remporter la Caméra d’Or, lors de la dernière édition du Festival de Cannes en 2021, avec son superbe premier long-métrage Murina (sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs), la réalisatrice croate Antoneta Alamat Kusijanović réalisait un sublime court-métrage Into The Blue. Le court, comme un prémisse aux schémas narratifs et aux thématiques de Murina ; suit Julija (Gracija Filipović , également actrice principale de Murina) une jeune adolescente de retour sur son île natale, après un incident familial. Elle y retrouve son amie d’enfance, Ana, et pense pouvoir renouer avec elle comme si le temps n’avait déjà pas d’emprise sur leurs jeunes existences. Pourtant Ana a changé, elle est amoureuse d’un garçon et Julija et son amitié ne sont plus sa priorité. La réalisatrice impressionne avec ce court-métrage abouti, où elle nous immerge littéralement dans les pensées et les émotions de Julija. On ressent son incompréhension et sa tristesse face à ce monde en mouvement où elle peine à garder pied et où, elle navigue difficilement les contours de son entrée fracassante sur les rives de l’adolescence. C’est une colère vive et une violence trop grande pour elle qu’expulse la jeune fille. La réalisation est un véritable écrin servi par une photographie solaire et intimiste, rehaussé de beaux plans aquatiques ; elle atteste du talent d’une réalisatrice à suivre !


LA RECOMMANDATION DE… PAULINE

Derby Girl - Saison 2 sur FranceTV Slash / diffusée depuis le 8 avril 

Synopsis : Lola Bouvier a enfin trouvé sa place au sein de la petite famille du roller derby : les Cannibal Licornes font désormais la fierté de Mézières. Alors que l’équipe se prépare pour la prochaine saison, la nouvelle chargée des sports de la mairie profite d’un malencontreux accident pour interdire le roller derby dans la ville. Lola Bouvier décide alors d’organiser la résistance…

Elle nous avait régalé en 2020 avec sa première saison, la drôle et déjantée Derby Girl est de retour avec ses anti-héroïnes hautes en couleurs. Sur la piste du roller derby, les Cannibal Licornes re-chaussent leurs patins pour huit épisodes savoureux sous le prisme de la résistance avec des péripéties qui collent à merveille à nos championnes. Phrases piquantes, anti-héroïnes décomplexées que l’on aime autant qu’on les déteste, la série nous bouscule gentillement mais sûrement. Une « petite » série qui a déjà conquis de nombreux cœurs et, comme le dit Lola Bouvier, protagoniste principale brillamment incarnée par Chloé Jouannet : « Ici, ce que je vous propose, c’est de la liberté : juste du derby, de la sueur et de la bière »


Dans notre dernier épisode de Sorociné, nous revenons sur la carrière de Romy Schneider

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