PETITE SOLANGE - Axelle Ropert

Petite Solange deviendra grande

On ne m’avait jamais dit à quel point la vie faisait souffrir”. Ce sont les mots de Solange, interprétée par Jade Springer, à la fin du quatrième long métrage d’Axelle Ropert. La souffrance dont elle parle concerne ses parents, en plein divorce. Cette adolescente de treize ans, encore une enfant dans ses gestes et ses émotions — comme le souligne le titre Petite Solange — voit sa vie partir à vau l’eau. Rythmé par les conversations tendues, les crises de larmes et les sous-entendus, son quotidien rangé dans une famille heureuse périclite et laisse place au gouffre du changement : vente de la maison, déchirement, nouvelle relation des parents. Si le divorce nous paraît aujourd’hui une souffrance bien banale pour un enfant (environ 130 000 divorces sont prononcé chaque année en France), la réalisatrice et scénariste française range cette banalité au placard et montre qu’il est toujours aussi difficile, surtout à un âge de transition, de voir sa famille voler en éclat.

À travers le regard d’une adolescente

Aurélia et Antoine (Léa Drucker et Philippe Katerine) fêtent leur vingt ans de mariage. Dans l’intimité, le couple uni s’offre leurs cadeaux tandis que leurs deux enfants, Romain (Grégoire Montana-Haroche) et Solange, s’occupent de l’organisation et des invités. Dans la caméra d’Axelle Ropert se dresse une famille des plus classiques. La mère est actrice de théâtre, un peu fantasque. Lui possède un magasin d'instruments de musique. Leur fils aîné a vingt et un ans et part bientôt à Madrid pour ses études. Et leur fille cadette est adorable, travailleuse et ordonnée. Qu’importe le bonheur de surface du couple, l’intérieur se délite, la fin est proche.

Au lieu de placer le récit au cœur du déchirement, la cinéaste ne quitte jamais son héroïne principale, le drame est alors déplacé. Il ne sera pas question de tempête mais plutôt de ses conséquences. À l’image de sa leçon de physique sur la vitesse de la lumière, c’est avec un certain décalage que Solange comprendra que les tensions sont irréversibles. 

La mise en scène se veut sobre pour porter le poids des émotions de Solange. Ce n’est que par son point de vue que nous entendons, succinctement, les engueulades, les cris. Impuissante, elle est spectatrice des échanges, et incapable de gérer ces changements, préfère déambuler dans les rues de Nantes. Le personnage subit un double abandon : l’amour de ses parents, et le départ précipité de son frère aîné, la laissant seule et sans soutien. Dénudé du côté mélodramatique de la séparation, Petite Solange a alors toute la place pour établir une jolie délicatesse autour de Jade Springer, qui accapare la caméra de son regard amer. L’actrice déploie un jeu nuancé sur le chagrin d’une jeune adolescente, témoin du délitement de l’amour. Solange, protégée dans sa bulle de la classe moyenne sans souci d’argent, avec des parents aimants et présents, subit pour la première fois un changement majeur, une souffrance qui marquera l’intégralité de sa vie. 

Si le propos n’a rien de novateur, la fragilité contenu au travers du regard de l’adolescente a de quoi émouvoir. Axelle Ropert filme l’effritement des convictions avec beaucoup de pudeur, transformant la banalité du mélodrame en une perte brutale de l’innocence enfantine. 


Réalisé par Axelle Ropert

Avec Jade Springer, Léa Drucker, Philippe Katerine, ...

Solange a 13 ans, elle est pleine de vie et de curiosité avec quelque chose de spécial : elle est sentimentale à l’excès, et adore ses parents. Mais un jour, elle réalise qu’ils se disputent et commencent à s’éloigner.... l’ombre du divorce se précise. Alors Solange va s’inquiéter, réagir et souffrir. C’est l’histoire d’une jeune ado trop tendre qui voudrait une chose impossible : que l’amour jamais ne s’arrête.

En salle le 2 février 2022

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