NIFF 2024 : HANDLING THE UNDEAD - Thea Hvistendahl

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Le retour des morts-vivants

Présenté au Festival international du film fantastique de Neuchâtel, qui se tient jusqu’au 13 juillet, ce long-métrage norvégien se joue des codes du film de zombies en imaginant très concrètement un retour des morts parmi les vivants. Visuellement époustouflant, il déroute avec un rythme très lent, qui participe pourtant d’un renouvellement du genre.

Il est des films qui exigent un engagement total des spectateurs. Dont la réussite dépend grandement du degré d’attention qu’on saura leur donner car nul montage effréné, nul twist incroyable, nulle action débridée ne viendra nous chercher au fond de notre siège. Handling the Undead est de ceux-là mais, et ce sera la seule grande surprise, il s’agit d’un film… de zombies. La réalisatrice norvégienne Thea Hvistendahl adapte un roman suédois qui imagine le réveil des morts par une chaude soirée d’été à Oslo.

C’est ainsi que Mahler, qui a tragiquement perdu son petit-fils, l’entend gratter dans son cercueil et va le déterrer. Ainsi que David, qui pleure sa femme décédée dans un accident de voiture, la voit sous ses yeux reprendre vie sur la table de la morgue. Ainsi que Tora, vieille dame qui vient d’enterrer sa compagne, sursaute quand celle-ci revient chez elles. Le premier pas de côté de Handling the Undead est de refuser l’horreur de ces résurrections, quand bien même les zombies font peur à voir, pour montrer au contraire l’immense soulagement des vivants à l’idée de retrouver ceux qui ont été perdus. Très concrètement, comment réagirait-on si les morts revenaient à la vie ? S’il nous était permis de repousser le deuil encore un peu, de combler le trou béant laissé par l’absence des êtres aimés ? Nous verrions sûrement ça d’abord comme une seconde chance, plus que comme une menace, suggère intelligemment le film.

L’autre pas de côté est celui de ce faux rythme adopté par Thea Hvistendahl, qui prend le temps d’installer chacun des trois foyers au cœur du récit, et ne profite pas de l’éveil des zombies pour accélérer franchement. Cette lenteur, que l’on concèdera volontiers déconcertante, voire rebutante, participe pourtant à créer une tension à la fois effrayante et tragique. Ces retrouvailles avec les morts ne peuvent évidemment pas bien se terminer et il y a dans Handling the Undead une sublimation magnifique de la tristesse. La cinéaste choisit d’ailleurs, après une bascule franchement horrifique, de clore son film sur une scène infiniment plus émouvante.

Mais la lenteur de Handling the Undead n’est appréciable que parce que la mise en scène et la photographie s’accordent délicieusement avec elle. Thea Hvistendahl redessine l’espace avec d’amples mouvements de caméra qui viennent caresser les bâtiments d’Oslo, les forêts avoisinantes ou les intérieurs modernes. Elle nous invite, un battement de cil après l’autre, à vagabonder d’immeuble en parcs, d’un couloir à une chambre, avec une fluidité extraordinaire. Son image désaturée construit peu à peu des tableaux lugubres mais fascinants, comme autant de petits théâtres désertés, dans lesquels se jouent des pièces de peu de mots. S’il ne séduira sûrement pas les amateurs de sensations fortes et de jumpscare, Handling the Undead a le mérite de la contre-proposition maîtrisée de bout en bout.

MARGAUX BARALON

Handling the Undead

Réalisé par Thea Hvistendahl

Écrit par John Ajvide Lindqvist et Thea Hvistendahl

Avec Renate Reinsve, Anders Danielsen Lie, Bahar Pars

Norvège, Suède, 2024

Stockholm, 2002. Un orage terrasse les vivants et réveille les morts. Tous ceux qui ont disparu depuis deux mois reviennent à la vie. Dans quel état ? Dans quel but ? Pour les familles, l'espoir se mêle à l'horreur.

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