LES SENTIERS DE L'OUBLI - Nicol Ruiz Benavides

Vers l'avenir

Les Sentiers de l’oubli est un petit film par sa durée, de seulement 71 minutes. Il traite du sujet tabou qu’est l’homosexualité à l’âge mûr, d’autant plus qu’il s’agit d’une rencontre amoureuse vécue comme une romance d’adolescente. Au décès de son mari, Claudina va habiter chez sa fille et son petit-fils. Elle se rapproche de leur voisine, Elsa, une femme indépendante qui vit des relations extra-conjugales avec l’accord de son mari. Claudina se confie vite à Elsa sur ses questionnements quant à ses préférences romantiques, Elsa lui répond… Les deux femmes s’en vont fréquenter le Porvenir, un bar clandestin gay, mais Alejandra, la fille de Claudina se doute bien vite de quelque chose.

Au début du film, la radio annonce la présence de voisins venus de l’espace autour de la Terre. Les gens se regroupent pour observer ces phénomènes qu’on ne voit pas dans le ciel – on devine aisément un manque de budget. Mais la symbolique des OVNIS est très jolie, c’est l’arrivée d’autre chose, d’un futur incertain mais onirique, dans la vie de Claudina qui ne fait que commencer. Son interprète, Rosa Ramirez Rios, a toujours le sourire aux lèvres et les yeux un peu ailleurs, l’air rêveur, comme si rien ne pouvait l’atteindre. Elle jette des cailloux sur la maison d’Elsa pour attirer son attention le soir, elle semble presque découvrir avec candeur les joies d’une relation amoureuse alors qu’elle dit l’avoir déjà vécue. Il ne faut pas se fier au titre Les Sentiers de l’oubli car ce n’est pas un film tourné vers le passé, c’est une œuvre lumineuse qui écrit le bonheur d’une dame fraîchement veuve, contrastant avec les premières scènes, âpres, constituées de tableaux fixes de Claudina dans sa vieille maison.

La grande faiblesse des Sentiers de l’oubli réside néanmoins dans une mise en scène trop imprécise, davantage portée sur le jeu des (merveilleuses) actrices plutôt que sur le sens de chaque plan. Certains effets sont tout à fait dispensables, comme un abus de surcadrage, la composition est parfois un peu maladroite, tout comme le montage manque de rigueur. L’hésitation dans la grammaire cinématographique (certainement liée au fait que ce ne soit qu’un premier film) ne permet pas au scénario de s’incarner comme il se doit. Certaines scènes tirent leur lot du jeu, notamment lorsqu’il s’agit des profusions de sentiment de Claudina, ou celles accompagnées d’une musique utilisée avec parcimonie, mais l’ensemble reste malheureusement pauvre. Pourtant, Les Sentiers de l’oubli est une œuvre qui se joue sur la bonne tonalité, avec une douce pudeur qui montre sans trop en dévoiler, qui fait entrer la tendresse et la bienveillance sans trop en abuser. C’est dommage qu’elle ne parvienne davantage à prendre pleinement l’envol promis par toute ses capacités.


Réalisé par Nicol Ruiz Benavides

Avec Romana Satt, Rosa Ramirez Rios, Gabriela Arancibia...

Après le décès de son mari, Claudina se retrouve dans une routine solitaire. Elle décide de quitter la campagne pour rejoindre son petit-fils Cristóban et sa fille Alejandra, avec qui la communication est compliquée. C’est ici qu’elle fait la connaissance d’Elsa, une femme indépendante et mariée qui chante dans un bar caché appelé « Porvenir » (L’avenir). Une rencontre qui va lui permettre de s’émanciper d’une vie religieuse et conservatrice.

En salle le 4 août 2021

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